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La Lettre
Noyau de la galaxie de Persée possédant un
trou noir obèse (image prise par la NASA)
© NASA/ESA
Chili, a commencé ses observations aux confins de l'Univers, et a découvert avec surprise des galaxies
massives, possédant en leur centre des trous noirs d'un milliard de soleils, au moins 10 fois plus massifs
qu'attendus.
S’il existe, dans notre univers local, un rapport bien établi entre la masse du trou noir dans le centre d'une
galaxie et celle de son bulbe, les trous noirs du début de l'Univers semblent croître beaucoup plus vite
que leur bulbe d'étoiles. Sans doute ont-ils dû prendre de l'avance et se former à partir de l'effondrement
d'une superétoile de 10 000 soleils, puis avaler sans répit tout le gaz et les étoiles du voisinage. Au cours
du temps, les étoiles se forment plus vite, rattrappent leur retard, et on retombe sur le rapport bien connu,
masse du trou noir égale à 0,5 % de la masse du bulbe, sauf peut-être dans des cas, très rares, où les
galaxies entrent dans un amas.
Les amas de galaxies se forment à peu près à la
moitié de l'âge de l'Univers, par interaction et fusion
entre des milliers de galaxies. Ils sont remplis de
gaz très chaud - plusieurs millions de degrés -, et
les galaxies tombant dans l'amas à grande vitesse
sont balayées par le vent, perdent leur gaz et ne
peuvent plus former d'étoiles. La masse du trou
noir reste alors très grande devant la très petite
masse du bulbe. C'est ainsi que des trous noirs
véritablement obèses, de masse 100 fois plus
grande qu'attendue, ont pu être pesés dans l'amas
de Persée !
Dans un avenir proche, ALMAet le télescope spatial
James Webb vont pouvoir explorer les premières
galaxies du début de l'Univers, et permettre de comprendre comment se sont formées toutes les étoiles
qui nous entourent. Par ailleurs, les interféromètres à très longue base, entre les divers radiotélescopes
millimétriques à travers le monde, vont constituer ce que l'on appelle l'
Event Horizon Telescope
, qui pourra
résoudre des tailles minuscules autour des trous noirs supermassifs des noyaux de galaxies : il sera alors
possible, enfin, de cartographier ce qui se passe autour de l'horizon de ces trous noirs, et atteindre leur
ombre, là où les rayons lumineux sont définitivement avalés. Non seulement ces observations apporteront
des informations sur la rotation des trous noirs, mais aussi sur les effets de gravité en champ fort.
*Affiliation des auteurs
Françoise Combes, LERMA, Observatoire de Paris, et Collège de France ; Pierre Encrenaz, LERMA,
Observatoire de Paris ; Anne-Marie Lagrange, Institut de planétologie et d’astrophysique de Grenoble ;
Pierre Léna, LESIA, Observatoire de Paris ; Jean-Loup Puget, Institut d'astrophysique spatiale, université
Paris-Sud, Orsay ; Daniel Rouan, LESIA, Observatoire de Paris