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La Lettre
© B.Eymann - Académie des sciences
Gérard Berry
Membre de l’Académie des sciences – section
Sciences
mécaniques et informatiques
–, professeur au Collège de France
Mécanique, mathématiques appliquées, informatique,
théorie du contrôle, traitement du signal : tous ces
domaines de la section
Sciences mécaniques et
informatiques
de l’Académie n’ont bien sûr pas
350 ans, les mathématiques appliquées modernes et
l’informatique n’étant nées qu’au 20
e
siècle. Mais une
pensée et une action commune les traversent : l’invention
et l’optimisation de machines de toutes sortes qui sont
au cœur des révolutions industrielles successives, du
moteur à l’ordinateur en passant par le train, l’automobile, l’avion, la machine-outil, etc.
La matière et l’énergie ont formé le socle des sciences et des techniques jusqu’au milieu du 19
e
siècle.
Les machines mécaniques, puis électriques, utilisent l’énergie pour transporter et travailler la matière,
ou encore transforment une forme d’énergie en une autre : toute la grande révolution industrielle née au
18
e
siècle repose sur elles. Puis les ondes électromagnétiques, exploitées à la fin du 19
e
siècle, ont
complété le triangle en permettant de connecter les hommes entre eux sans support matériel.
Jusqu’au milieu du 20
e
siècle, la notion d’information n’était pas vraiment explicite, même si son rôle
était déjà bien central. Les progrès ont en effet toujours reposé sur une mesure de plus en plus fine de
phénomènes naturels comme l’équilibre des forces, les frottements, la combustion et le rayonnement,
conduisant à mieux modéliser la nature et à perfectionner les machines grâce à de meilleures architectures
et de meilleurs plans. Or, mesures, modèles, calculs, architectures et plans sont tous du domaine de
l’information, transmise par des supports matériels standards comme le livre ou le tableau et la craie.
Avec l’informatique moderne, l’information et les algorithmes qui la manipulent se trouvent magnifiés, de
telle sorte que nous vivons maintenant sur un tétraèdre et plus sur un triangle. Notons en passant que les
méthodes algorithmiques de calcul sont anciennes, antérieures à la mécanique, aux mathématiques et
même à l’écriture. Le mot algorithme lui-même vient du nom du grand savant persan Al Khuwārizmī, alors
que le mot algèbre vient de son traité
Al Jabr
sur la résolution des équations par calcul.
Machines et information