Foire aux questions : l’Académie s’exprime au travers de son Comité de Prospective en énergie

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Dans un contexte où circulent sur internet de nombreuses informations erronées ou approximatives sur les grands enjeux scientifiques, l’Académie des sciences choisit de mettre à disposition une Foire aux questions (FAQ) afin d’apporter un éclairage fiable, rigoureux et accessible.

05.12.2025
Mathieu Baumer

© Académie des sciences - Mathieu Baumer

Dans un contexte où circulent sur internet de nombreuses informations erronées ou approximatives sur les grands enjeux scientifiques, l’Académie des sciences choisit de mettre à disposition une Foire aux questions (FAQ) afin d’apporter un éclairage fiable, rigoureux et accessible. Face à la complexité croissante des sujets traités, qu’il s’agisse d’énergie, de climat, de santé ou de technologies émergentes, il est essentiel que les décideurs, les journalistes et le grand public puissent disposer de repères sûrs pour comprendre les positions et l’expertise de l’Académie.

Ce document vise ainsi à répondre aux questions légitimes que suscite la diffusion de certaines affirmations inexactes ou trompeuses, en rappelant les faits établis, les méthodes d’analyse et les fondements scientifiques qui guident le travail de l’Académie. En réaffirmant son rôle de tiers de confiance, l’Académie des sciences entend contribuer à un débat public mieux informé, fondé sur la connaissance et non sur la désinformation.

Ces questions interviennent dans le contexte de la  Programmation pluriannuelle de l’énergie sur laquelle l’Académie s’est exprimée au travers de son Comité de Prospective en énergie (CPE). 

Foire aux questions

L’Académie des sciences met son expertise au service des grands enjeux sociétaux, notamment celui de l’énergie, dont les choix actuels détermineront l’avenir. Alors que plus de 80 % de l’énergie mondiale repose encore sur les fossiles, la transition vers des systèmes bas-carbone est indispensable pour atteindre la neutralité carbone en 2050. 

Malgré les progrès des énergies bas-carbone et des technologies de décarbonation, de nombreux défis subsistent, comme la stabilité des réseaux, le rôle de l’hydrogène ou le potentiel de l’électrification. Dans ce contexte, l’Académie souligne l’importance d’un éclairage scientifique rigoureux pour guider décideurs et citoyens dans cette transformation essentielle.

Le comité de prospective en énergie de l’Académie des sciences existe depuis plus de 20 ans. Il est constitué de nombreux spécialistes de diverses disciplines scientifiques (chimie, biologie, physique, mécanique, informatique, etc.) reconnus par leurs pairs et qui sont au cœur de la question énergétique. Ils apportent au comité une assise scientifique de très haut niveau. 

Le comité a publié de nombreux rapports sur divers sujets concernant le nucléaire, mais aussi la biomasse, l’hydrogène, etc. Pour ce faire, le comité a auditionné un très grand nombre d’experts de l’industrie, d’organismes, d’agences publiques, d’élus (députés), d’autres académies, etc. Ce dernier a ainsi une excellente connaissance des enjeux scientifiques et techniques de la transition énergétique et n’hésite pas à étudier avec soin les rapports des autres organes de réflexion sur la transition énergétique tels que : la CRE, l’ADEME ou RTE.

L’avis de l’Académie des sciences n’est pas défavorable aux énergies renouvelables. D’ailleurs l’Académie des sciences au travers du Comité de Prospective en énergie (CPE) a toujours défendu un mix électrique équilibré entre nucléaire, hydraulique, solaire et éolien (il suffit de lire ses points de vue sur cette question). 

Dans son avis sur la Programmation pluriannuelle de l’énergie, l’Académie des sciences au travers de son Comité de Prospective en énergie (CPE) a alerté les autorités sur la possibilité d’un trop gros niveau de surproduction électrique (avec des conséquences problématiques) et a posé la question de la pertinence d’ajouter 200 TWh d’énergies non pilotables dans un contexte de baisse de la consommation électrique (RTE a confirmé que la consommation électrique au premier semestre 2025 n’est pas supérieure à celle du premier semestre 2024). Récemment , la RTE abaisse de 60 TWh sa cible haute de consommation électrique, dans la mise à jour de ses scénarios pour 2035. Le gestionnaire des lignes à haute tension acte le retard de la demande électrique et de l'électrification des usages, à l'heure où le gouvernement remet la programmation énergétique du pays sur la table.

La PPE3 proposait d’installer massivement de nouvelles capacités de production éolienne et solaire, justement pour répondre à une demande qui augmenterait fortement entre 2025 et 2035. Le texte de la PPE3 s’appuyait sur une anticipation d’augmentation de la consommation électrique. Or, force est de constater que la consommation d’électricité baisse depuis 2017 et n’augmente pas entre 2024 et 2025. C’est malheureux mais l’électrification des usages (transport, chauffage, industrie) ne se confirme pas.

En outre, l’Agence Internationale de l’Energie (AIE) vient de publier son World Energy Outlook 2025. On y voit que l’AIE prévoit une augmentation de 35% de la production nucléaire d’ici 2035 et d’ici 2050 cette hausse pourrait atteindre 80 % (presque le double) suite à l’engagement de plus de 40 pays à développer l’usage du nucléaire. Plus de 70 GW de capacité nucléaire sont en construction dans le monde, ce qui représente l’un des niveaux les plus élevés des 3 dernières décennies. 

L’avis de l’Académie des sciences, en défendant un mix électrique, n’est pas isolé. 

Non. En effet, la participation des Académiciens à des comités scientifiques ou à des instances externes, y compris au sein d’entreprises (publiques ou privées), relève d’activités d’expertise qui ne peuvent être assimilées à des situations de conflit d’intérêts. Les activités et intérêts extérieurs des Académiciens contribuent au contraire à enrichir les travaux académiques en apportant une diversité d’expériences et de compétences, sans compromettre leur intégrité scientifique. 

Cette indépendance est assurée par un cadre rigoureux de transparence et d’intégrité reposant notamment sur : la déclaration des intérêts  et activités des Académiciens ; la publication de la liste des experts participant aux travaux ; des procédures de validation par les pairs ; le respect d’un code éthique et de bonnes pratiques pour toute contribution à la revue des Comptes Rendus

L’avis sur la PPE3 du Comité de prospective en énergie (CPE), publié au nom de l’Académie des sciences, s’inscrit dans le cadre légal de la consultation publique, ouverte à tout organisme. Cette consultation s’est déroulée dans un temps très court (entre le 4 novembre et le 16 décembre 2024), incompatible avec la mise en place d’une série d’auditions spécifiques. 

Il a cependant été élaboré selon ses procédures internes habituelles d’expertise collective, l’Académie des sciences réaffirme qu’il Il n’est pas besoin d’être spécialiste des énergies renouvelables pour avoir un avis sur la question du niveau de surproduction électrique (excès de production par rapport à la consommation) et du niveau des sources intermittentes, les deux niveaux ayant une incidence à la fois économique (le marché de l’électricité) et technique (par exemple sur la modulation nucléaire) notamment dans un contexte d’absence de capacités de stockage à grande échelle. 

De nombreux acteurs reconnus de l’énergie se posent ces mêmes questions dans les mêmes termes (voir notamment les avis du Haut-Commissaire à l’Énergie Atomique).

Les rapports de l’Académie des sciences sont remis aux autorités commanditaires ou, en cas d’auto-saisine, aux autorités compétentes. Sauf cas exceptionnels, les rapports sont rendus publics.

Conformément à ses règles internes de transparence, l’Académie met à disposition la liste des experts, leurs éléments de parcours professionnel ainsi que tout lien pertinent avec les parties concernées par l’expertise. 

Les documents préparatoires des rapports ne sont pas destinés à la publication car il peuvent notamment contenir des données personnelles, des éléments non consolidés ou des contributions de scientifiques n’ayant pas donné leur accord à une diffusion publique.

La diffusion non autorisée de tels documents peut constituer une violation du cadre juridique. Le cas échéant, l’Académie se réserve la possibilité de saisir la CNIL ou les autorités compétentes. 

Créée en 1835 par le physicien François Arago, alors Secrétaire perpétuel, la revue Comptes rendus de l’Académie des sciences permet aux chercheurs de tous établissements et de tous pays de faire connaître leurs travaux à la communauté scientifique internationale.

Elle se décline en sept séries couvrant l’éventail des domaines de la recherche en sciences exactes et appliquées : Mathématique, Mécanique, Chimie, Biologies, Géoscience - Sciences de la planète, Physique et Palevol (paléontologie évolutive). Chaque titre est piloté par un ou plusieurs rédacteur(s) en chef, assisté(s) d’un comité éditorial. 

Les articles soumis sont tous expertisés par des scientifiques dont la compétence est reconnue dans le domaine concerné. Elles sont complétées par Vie des sciences, carnet de recherche ouvert à destination de tous les amateurs de sciences, y compris en dehors de la communauté académique.

Le 3 décembre 2025, dans un contexte où la diffusion des savoirs est fragilisée par un modèle économique déséquilibré, l’Académie des sciences et le CNRS, premier acteur européen de la recherche, ont signé un accord de coédition pour soutenir un modèle de publication scientifique en libre accès diamant, gratuit pour les auteurs comme pour les lecteurs.

Depuis sa création en 1666,  l’Académie des sciences conduit des réflexions relatives aux enjeux politiques, éthiques et sociétaux que posent les questions scientifiques, Elle veille  à faire vivre, dans l’espace public, les principes de raison, de connaissance et de débat serein qui fondent la démarche scientifique. 

L’Académie des sciences s’inquiète des attaques dont certains de ses membres et elle-même ont récemment fait l’objet, car ces dérives portent atteinte à la liberté académique, 

Elle rappelle avec force qu’un désaccord scientifique, même vif, ne justifie ni la mise en cause personnelle de ses membres, ni des accusations infondées portant atteinte à leur réputation ou à l’intégrité de l’institution. Elle réaffirme son attachement au respect et à l’intégrité intellectuelle, conditions indispensables à un débat scientifique rigoureux et constructif.

En cas de propos dénigrants ou diffamatoires, l’Académie se réserve la possibilité de saisir les autorités.