Rapport du Comité de prospective en énergie de l’Académie des sciences - Janvier2024
RÉSUMÉ EXÉCUTIF
Le débat public concernant l’avenir du mix énergétique français à l’horizon 2050 a longtemps été réduit à la seule considération de son volet électrique, dans une opposition entre énergie nucléaire et énergies renouvelables (EnR). Pourtant, la part non-électrique de notre consommation énergétique constitue clairement aujourd’hui un des principaux défis de la transition climatique et énergétique. Actuellement issue du pétrole, du gaz et du charbon, elle constitue l’angle mort des divers scénarios énergétiques disponibles, alors qu’elle restera encore indispensable, notamment dans le secteur de la mobilité et de la production de chaleur.
Le Comité de prospective en énergie (CPE) de l’Académie des sciences examine ici les ressources énergétiques et carbonées pouvant être tirées de la biomasse, qui présente des atouts certains en permettant le stockage de l’énergie sous forme de biogaz ou de biocarburants, et les perspectives raisonnables offertes par celles-ci dans le mix énergétique national à l’horizon 2050. Le présent rapport se focalise sur les aspects scientifiques et technologiques, sans occulter certaines considérations environnementales, économiques, sociales, et de souveraineté nationale, abordés à la lumière de la littérature disponible et de l’audition d’experts des divers domaines considérés.
Après avoir défini la notion de biomasse dans sa diversité, le rapport décrit les différentes bioénergies possibles et leurs limites. Les utilisations actuelles de la biomasse en France sont évaluées et comparées aux perspectives envisagées à l’horizon 2050 au regard du potentiel réellement mobilisable, pour lequel il existe une grande variation dans les estimations proposées, et des technologies nécessaires à sa transformation, qui restent, pour la plupart, coûteuses et de faible maturité. Ainsi, cette analyse montre notamment que le besoin d’énergie non-électrique, tel qu’il est défini dans le scénario de référence fourni par Réseau de transport d’électricité (RTE), sera difficile – pour ne pas dire impossible - à atteindre avec la seule biomasse produite en France : le bouclage énergétique 2050 passera nécessairement par un maintien d’importations de gaz naturel et par de nouvelles importations de biomasse et/ou de bioénergie introduisant des dépendances nouvelles et exportant les risques associés à leur utilisation massive.
Le rapport rappelle que la bioénergie reste l’énergie la moins favorable en termes d’empreinte spatiale et que la biomasse a, sur toute la chaîne des valeurs, un faible retour énergétique. Sa plus grande mobilisation, qui ne devra pas se faire au détriment de la sécurité alimentaire humaine et animale, ni au détriment des éco-services rendus par la biosphère, aura des impacts environnementaux certains qu’il faudrait estimer avec rigueur. Enfin, le remplacement de la pétrochimie industrielle par une nouvelle « carbochimie biosourcée » va nécessiter des efforts considérables d’adaptation des procédés et de recherche et développement dans le domaine de la catalyse, de la chimie de synthèse et des biotechnologies.
Ces conclusions conduisent le CPE à formuler des recommandations concernant :
1.La nécessaire amélioration de la concertation entre les divers organismes et agences pour aboutir à une estimation rigoureuse et convergente des ressources potentielles,
2.La réalisation de bilans carbone des diverses filières et d’analyses en termes de retour énergétique des investissements envisagés, pour s’assurer de la soutenabilité et du gain en carbone qui ne sont pas acquis pour le moment,
3.Le soutien au déploiement de la recherche et développement des filières de biocarburants de seconde génération pour accroitre leur maturité industrielle,
4.La poursuite du développement d’une chimie organique de synthèse biosourcée,
5.La priorité à établir dans l’utilisation de la biomasse pour les usages qui ne pourront être décarbonés par l’électricité, passant par une politique publique permettant de résoudre les conflits d’usages,
6.La nécessité de concertation des politiques énergétique et agroalimentaire de notre pays.
DOI : 10.62686/1
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