Avis commun | Académie des sciences - Académie des beaux-arts - Académie des sciences morales et politiques - Paris, 24 février 2022
RÉSUMÉ EXÉCUTIF
L’urgence climatique impose de remplacer rapidement le recours aux combustibles fossiles, fortement émetteurs de gaz à effet de serre, par d’autres modes de production d’énergie. Même dans un contexte de sobriété énergétique, la décarbonation des transports et de la production de chaleur nécessitera de faire une place bien plus grande à une électricité bas-carbone dans la consommation énergétique totale. Ainsi, l'objectif de neutralité carbone fixé à l’horizon 2050 impose le recours à des sources d'énergie renouvelables et au nucléaire dans des proportions qu’il convient de définir sans a priori idéologique mais en parfaite cohérence avec le contexte énergétique de chaque pays, ses stratégies industrielles et ses contraintes géographiques, économiques, sociales et écologiques. Le questionnement actuel sur la place des éoliennes dans le mix électrique français a conduit les Académies des sciences, des beaux-arts et des sciences morales et politiques de l’Institut de France à croiser leurs appréciations dans l’objectif d’établir un état des lieux et de formuler des recommandations.
La France produit une électricité décarbonée à 92%, assurée majoritairement par le nucléaire (71%), l’hydroélectricité (11%) et, dans une moindre mesure, par l’éolien (6%) et le photovoltaïque (2%). Cette production nationale est insuffisante dès que les températures hivernales sont basses et, sans vent, la France ne peut alors assurer ses besoins qu’en important de l’électricité provenant de sources fossiles.
La production d’électricité éolienne et photovoltaïque se caractérise par une intermittence qui, dans l’état actuel des capacités de stockage de l’électricité, empêche de s’affranchir des combustibles fossiles. Ces derniers, quand ils sont importés, pèsent sur la balance commerciale du pays et alourdissent sa dépendance énergétique.
L’implantation d’éoliennes terrestres et littorales se heurte à des résistances de plus en plus grandes du fait des nuisances qu’elles occasionnent : bruits, dénaturation et défiguration des paysages, perte de valeur patrimoniale des biens immobiliers ou d’attrait touristique des régions concernées. Les éoliennes doivent être installées dans des territoires où le vent est en moyenne suffisamment fort pour être efficace et suffisamment constant pour être utilisable. Cela conduit à les construire en nombre et à les concentrer dans certaines régions, indépendamment des besoins énergétiques locaux, accentuant ainsi un sentiment d’injustice territoriale. Ces zones choisies sont le plus souvent également importantes pour la protection de la biodiversité car, moins peuplées, elles abritent des espèces rares et parfois sensibles dans des milieux moins perturbés par les actions humaines.
Pour faire face au changement climatique, l’état actuel des connaissances et des technologies impose la mise en place d’un mix électrique bas-carbone nécessairement complexe, combinant énergies renouvelables et nucléaire. Cette dernière devra continuer d’occuper une part importante du mix énergétique car elle reste la principale source d’électricité décarbonée non intermittente.
Concernant les énergies renouvelables, en plus du potentiel dont dispose toujours le photovoltaïque, les éoliennes offshore, plus susceptibles d’être acceptées par les populations que leurs équivalentes terrestres, offrent des perspectives intéressantes : dotées d’une puissance et d'une disponibilité nettement plus élevées que celles de l’éolien terrestre, elles permettent d’envisager une participation de l’éolien à la hauteur de 25% du mix électrique de 2050. L’optimisation de leur contribution au mix énergétique reste cependant conditionnée par des innovations et des investissements importants dans le domaine du stockage de l’énergie et du recyclage de leurs matériaux ainsi que par la démonstration qu’elles ne perturbent pas profondément la biodiversité des milieux où elles sont déployées.
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