William Chaloner

22 novembre 1928 - 13 octobre 2016
Notice nécrologique
William Chaloner, Bill, comme l’appelaient ses collaborateurs et amis, est décédé le 13 octobre 2016, à
l’âge de 87 ans. Il avait été élu membre associé étranger de notre Académie le 24 avril 1989 dans la section Biologie Intégrative.
Né à Londres, il fait ses études de botanique, chimie et géologie à l’université de Reading à partir de 1947. Il y défend son PhD "The
spores of the carboniferous Lycopods" en 1953. Les Lycopodes (ou Lycophytes) sont des végétaux vasculaires très primitifs, très répandus à la fin de l’ère
primaire avec de nombreuses grandes formes ligneuses arborescentes (comme le Lepidodendron, emblématique des forêts de la période carbonifère),
mais représentés de nos jours par seulement trois genres herbacés, que l’on classe entre les mousses et les fougères. Après son PhD, il
rejoint Chester Arnold, le père de la paléobotanique aux USA, à l’université du Michigan, où il continue ses travaux sur la flore
carbonifère. Après deux ans de service militaire en Allemagne, il est recruté comme assistant-lecturer en botanique à l’University College of London en 1956 et y deviendra professeur de paléobotanique en 1963. En 1972 il est nommé à la chaire de botanique du Birkbeck College et y reste 7 ans, avant de devenir
titulaire de la chaire du Bedford College. En 1985, le Bedford College fusionne avec le Royal Holloway College et il en devient professeur titulaire de la School of Life Science. De 1994, jusqu’à sa mort il sera Professeur émérite à l’Université de Londres, au département des sciences de la terre. Il sera également, à plusieurs reprises, professeur invité à la Pennsylvania State University, à l’université de Nsukka au Nigéria, où il acquiert ses connaissances des flores tropicales, et à l’Université du Massachusetts.
Il introduit de nouvelles méthodes en paléobotanique et il sera l’un des pionniers de l’utilisation de la microscopie électronique à balayage pour étudier les spores et pollens fossiles, dès les années soixante. Il aborde aussi l’étude biochimique de l’exine et de la sporopollenine qui donnent aux grains de pollen leur décoration spécifique souvent conservée dans les fossiles, devenant ainsi l’un des fondateurs de la palynologie moderne. Très vite, il réalise l’intérêt des fossiles pour non seulement reconstituer les flores passées, mais aussi en tirer des enseignements sur les conditions climatiques environnantes. Une part importante de ses recherches au Bedford College porte sur l’analyse des anneaux de croissance des bois fossiles pour décrire les variations locales du climat, en particulier au
cours de la période chaude du Crétacé. Une fois au Royal Holloway College, il concentre se s recherches sur les stomates, ces pores dans l’épiderme des feuilles qui permettent les échanges gazeux. Il établit un lien direct entre le nombre et la taille des pores des stomates avec la concentration atmosphérique en
CO2, plus tard utilisée en paléo-altimétrie pour connaître l’altitude à laquelle vivaient les plantes fossiles. Une thématique apparente, qui l’a passionné jusqu’à la fin de sa vie, est l’analyse des charbons de bois fossiles afin d’en tirer des informations sur la teneur en oxygène de l’atmosphère.
Au-delà de ses apports majeurs à la description des fossiles, à la systématique, à l’anatomie et à l’évolution des plantes, ses contributions sont largement à l’origine de nos conceptions sur les paléoclimats et sur la façon dont ils ont changé au cours des temps géologiques. L’ensemble de ses travaux a fait l’objet de plus de deux cent articles dont au moins 6 dans Nature. Il est également l’auteur de l’imposant chapitre sur les Lycophytes dans le traité de paléobotanique publié en 1967 par notre regretté confrère Edouard Boureau, dont il était très proche. William Chaloner était également très impliqué dans l’organisation de sa discipline, dans de nombreuses sociétés savantes qu’il a souvent animées et présidées, telles que la Linnean Society ou l’International Organisation of Paleobotany. Sa carrière a été marquée par de nombreuses distinctions telles que la Lyell medal, la Linnean medal et la Lapworth medal et il était un très actif Fellow de la Royal Society depuis 1976. Il était également membre du Board of Trustees des jardins royaux de Kew depuis 1983.
William Chaloner avait de nombreux liens avec les chercheurs français en paléobotanique et en palynologie, notamment au Museum National d’Histoire Naturelle puis à l’Université Paris 6 et à l’Université de Montpellier. Il était francophone et francophile et aimait passer ses vacances près de Montpellier. Il laisse le souvenir d’un "monument" de la paléobotanique, discret, très accessible aux étudiants et plein d’humour. Les rapports entre les plantes et leur environnement le passionnaient et sa conviction qu’ils doivent permettre d’éclairer les changements climatiques en cours était prémonitoire et reste très actuelle.
Michel Delseny délégué de la section de Biologie intégrative