Rudolf Kalman

Rudolf Kalman
19 mai 1930 – 2 juillet 2016

Notice nécrologique

Rudolf E. Kálmán, élu membre associé étranger de l'Académie des sciences le 22 mai 1989 dans la section des Sciences mécaniques et informatiques, s'est éteint le 2 juillet 2016.

Né le 19 mai 1930 à Budapest, il avait émigré aux États-Unis en 1943 et était diplômé du MIT et de Columbia University. Après avoir soutenu son doctorat à cette université en 1958, il travailla jusqu'en 1964 comme chercheur au Research Institute for Advanced Studies de Baltimore, et c'est durant cette période qu'il publia ses articles fondateurs sur ce qui est devenu depuis le "filtrage de Kalman". Il fut ensuite professeur à Stanford de 1964 à 1971, puis à l'University of Florida à Gainesville jusqu'en 1992 avant de rentrer en Europe où il terminera sa carrière à l'ETH de Zürich.

Rudolf Kálmán apporta des contributions nombreuses et fondamentales à la théorie des systèmes et à leur contrôle. Il établit sur des bases rigoureuses l'approche par représentation d'état des systèmes dynamiques, formalisant et étudiant les notions aujourd'hui classiques de contrôlabilité, d'identifiabilité ou de réalisation qui leur sont associées. Son apport majeur est sans conteste la solution qu'il apporta à la question du filtrage optimal, dont il donna une formulation récursive permettant de dépasser les limitations du filtrage de Wiener. Quoique cette proposition ait été reçue initialement avec scepticisme, l'impact du filtrage de Kalman allait se révéler considérable dans un très grand nombre de domaines, un de ses succès les plus marquants étant sans doute celui obtenu dans le cadre des missions Apollo, après avoir été retenu par la NASA pour le contrôle du guidage de ses vaisseaux. Au-delà de cet exemple emblématique et des applications de guidage qui ont suivi, dans des contextes tant civils que militaires, le filtrage de Kalman est devenu un outil incontournable dans les cadres les plus variés, touchant jusques aux sciences humaines et à l'économétrie. Loin de voir son importance s'affaiblir au cours du temps, il s'est encore récemment révélé d'une importance capitale pour les techniques d'assimilation de données qui sont au coeur des problématiques très actuelles de prévisions en météo et climat. Les innovations que Rudolf Kálmán a proposées et que l'on retrouve aujourd'hui dans tant de champs scientifiques et de réalisations industrielles sont un bénéfice pour l'humanité toute entière.

Rudolf Kálmán avait obtenu les plus prestigieuses distinctions : IEEE Medal of Honor en 1974, IEEE Centennial Medal en 1984, Kyoto Prize in Advanced Technology en 1985, Steele Prize of the American Mathematical Society en 1987, Richard E. Bellman Control Heritage Award en 1997, National Academy of Engineering's Charles Stark Draper Prize en 2008 et, enfin, la prestigieuse National Medal of Science en 2009, reçue des mains du président Barack Obama.

Élu Fellow de l'American Mathematical Society en 2012, Rudolf Kálmán était membre aux États-Unis de la National Academy of Sciences, de la National Academy of Engineering et de l'American Academy of Arts and Sciences. Il était également membre étranger des Académies des sciences de Hongrie et de Russie.

En parallèle de sa carrière internationale, Rudolf Kálmán avait tissé des liens étroits avec la communauté française, et en particulier avec notre confrère disparu Pierre Faurre qui avait été son étudiant à Stanford. C'est ensemble qu'ils créèrent en 1968 le centre Automatique et Systèmes de l'École des mines de Fontainebleau, dont il fut de 1969 à 1972 le premier directeur et dont il resta conseiller scientifique jusqu'en 1981. Sur lui comme sur l'ensemble de ses élèves, il exerça une influence profonde et durable.

Avec la disparition de Rudolf Kálmán, c'est une très forte personnalité, un scientifique exceptionnel, un visionnaire qui vient de nous quitter.

Patrick Flandrin