Henri Duranton

23 mars 1926 - 9 avril 2015
Notice nécrologique
Henri Duranton, élu membre de l'Académie des sciences le 7
mai 1979 dans la section maintenant appelée "Biologie
intégrative", nous a quittés le 9 avril 2015 à l'âge de 89 ans.
Né le 23 mars 1926 à Paris, Henri Duranton devient ingénieur
agronome de l'Institut national agronomique en 1951. Assistant puis
chargé de recherches à l'INRA (1951-1960), il y prépare sa thèse
(soutenue en 1959). De là date sa vocation pour la physiologie
végétale. Au retour d'une année postdoctorale aux USA, il est
nommé maitre de conférences à la faculté des sciences de
Strasbourg (1961), et y devient professeur titulaire à titre personnel
en 1966.
Très vite, il a su s'entourer d'une équipe performante, avec laquelle
il a développé des recherches de haut niveau, spécialement dans les
domaines suivants :
À l'époque toutes les enzymes connues pour être sensibles à la lumière étaient impliquées dans la
photosynthèse. Henri Duranton et son équipe démontrèrent que, dans le tubercule de topinambour (tissu
dépourvu du pigment clef de la photosynthèse, la chlorophylle), trois enzymes (arginase, phenylalanine
ammonia lyase et cinnamate hydroxylase) étaient sensibles à la lumière. Ceci les mit sur la piste d'un
autre pigment, le phytochrome, et de son rôle sur la morphogenèse des plantes, ce qui fut à l'origine de
nombreux travaux de par le monde.
À la suite d'expériences sur le métabolisme de l'euglène, Henri Duranton et ses élèves démontrèrent
l'existence d'une relation inverse entre la croissance des plastes et celle des mitochondries (organites
cellulaires de la photosynthèse et de la respiration, respectivement) : lors du verdissement de l'euglène, le
volume des plastes augmentait et celui des mitochondries diminuait, et c'était l'inverse lors du
blanchiment de l'algue, ce qui suggérait l'existence d'échanges de substances entre plastes et
mitochondries.
En ce qui concerne les virus des plantes, il n'y avait à l'époque que trois protéines virales dont la structure
primaire avait été identifiée : deux d'entre elles l'avaient été par Duranton et coll. Par ailleurs, on sait
qu'il existe dans les cellules plusieurs types d'acide ribonucléique tels que les ARNm (acide
ribonucléique messager) et les ARNt (acides ribonucléiques de transfert). Le groupe d'Henri Duranton fut
le premier à observer que l'acide ribonucléique viral pouvait se comporter aussi bien comme un ARNt
que comme un ARNm.
Le laboratoire d'Henri Duranton a été honoré de prix dont le grand prix Joannides. Lui-même a eu sa part
de charges prestigieuses (membre, à plusieurs reprises, du comité consultatif des universités et des
commissions du CNRS, président de l'université de Strasbourg) et de distinctions honorifiques (officier
de la Légion d'honneur, officier de l'Ordre national du mérite, commandeur des Palmes académiques).
Il n'hésitait pas à donner de sa personne : comme il n'existait pas encore d'appareil commercial de
chromatographie sur colonne, il construisit de ses mains l'appareillage nécessaire. Il était sensible aux
causes humanitaires et participa activement aux réunions du CODHOS (Comité de défense des hommes
de science). Il était chaleureux, ouvert à la discussion, curieux du travail des autres, facilement accessible
aux collègues et aux étudiants.
Il va nous manquer.
Michel Thellier, avril 2014