Alexander Rich

15 novembre 1924 - 27 avril 2015
Notice nécrologique
Alexander Rich est décédé le 27 avril 2015 dans sa 90e
année. Il avait été élu membre associé de l’Académie des sciences le 26 mars 1984 dans la section actuellement dénommée Biologie moléculaire et cellulaire, génomique.
Il était, depuis 1958, professeur au Massachusetts Institute of Technology (MIT, Cambridge, USA) dans le département de
biologie. Il fut l’un des pionniers de la biologie moléculaire et
structurale des acides nucléiques. Ainsi, il a été membre du très
sélectif RNA Tie Club, fondé en 1954, qui comprenait
vingt membres, un pour chaque acide aminé (il était
l’arginine), et dont l’objectif était de déterminer le code
génétique reliant les vingt acides aminés des protéines aux
suites de triplets construits à partir des quatre lettres de l’ADN.
Son oeuvre scientifique est omniprésente en biochimie et biologie structurale des acides nucléiques. Mais
on retient aussi qu’il a établi en 1955 la structure en triple hélice du collagène, protéine fibreuse de la
peau et des tissus conjonctifs. Il s’est ensuite consacré aux acides nucléiques et a été le premier à montrer
que de simples brins d’ADN se réassociaient spontanément en solution en formant une double hélice
(phénomène d’hybridation, utilisé quotidiennement dans tous les laboratoires de biologie moléculaire). Il
étendit, en 1956, cette possibilité à deux simples brins d’ARN qui pouvaient s’hybrider et former une
double hélice d’ARN, suggérant quelques années plus tard qu’un brin d’ARN antisens pouvait réguler
l’expression d’un brin d’ARN sens et préfigurant les récentes découvertes sur l’ARN interférent. Plus
tard, il découvrit les hélices hybrides constituées d’un brin d’ADN et d’un brin d’ARN, étape
indispensable lors de la copie d’ADN en ARN messager. Au cours d’une compétition très vive avec le
groupe d’Aaron Klug à Cambridge (Grande-Bretagne), le groupe d’Alex Rich cristallisa une seconde
forme cristalline de l’ARN de transfert de la phénylalanine de levure et en résolut la structure
cristallographique. Pendant une vingtaine d’années, l’ARN de transfert restera la structure d’ARN la plus
complexe résolue. Dans le domaine de la traduction, il a également été impliqué dans la découverte des
polysomes, ensemble de ribosomes synthétisant des protéines sur un ensemble d’ARN messagers. A
partir de clichés de microscopie électronique, il suggéra l’existence dans le ribosome d’un tunnel par
lequel s’échappent du ribosome les protéines en cours de synthèse. Les récentes structures du ribosome à
haute résolution lui ont donné raison.
Enfin, la découverte d’Alex Rich qui frappa la communauté scientifique à la fin des années soixante-dix
est celle de la structure de la double hélice d’ADN-Z. Depuis les travaux pionniers de Crick, Watson,
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Wilkins, et Franklin, les doubles hélices d’ADN étaient dites de formes A ou B selon le degré d’humidité
de l’environnement. Ces deux hélices régulières sont interconvertibles et toutes deux sont dextrogyres
dans les modèles de Watson et Crick. De manière inattendue, la première structure cristalline à haute
résolution d’une double hélice, obtenue par Alex Rich et ses collaborateurs en 1979, était irrégulière et
lévogyre (d’où son nom d’ADN-Z). Cette structure, résolue avant celle de la double hélice dextrogyre de
forme B à résolution atomique, suscita une effervescence expérimentale parmi les physico-chimistes et
biologistes moléculaires pendant de nombreuses années. Malgré tous ces efforts, les fonctions biologiques
de l’ADN en forme Z ne sont toujours pas établies, même si quelques éléments de réponse ont été
apportés.
L’oeuvre scientifique d’Alex Rich, vaste et pionnière, a été reconnue par de nombreux prix (National
Medal of Science, Bower Award, William Procter Prize, Lomonosov Large Gold Medal, Welch Award in
Chemistry). Il était également membre de plusieurs académies (Etats-Unis, Russie, Académie Pontificale
des Sciences).
Éric Westhof